Au lendemain de la 5e Conférence des ministres de la Culture de la Francophonie, qui s’est tenue fin mai 2025 à Québec, l’OIF continue de s’investir dans le développement des industries culturelles et la découvrabilité.
La découvrabilité… un mot un peu abstrait, mais une notion essentielle désormais pour penser la diversité culturelle et agir pour sa promotion. Selon sa définition, « La découvrabilité d’un contenu dans l’environnement numérique se réfère à sa disponibilité en ligne et à sa capacité à être repéré parmi un vaste ensemble d’autres contenus, en particulier par une personne qui n’en faisait pas précisément la recherche. » A l’heure où nos habitudes de consommation sont scrutées par des algorithmes, qui tendent à anticiper nos besoins et nous enfermer dans des bulles de filtres, cette tendance est d’autant plus importante pour les biens culturels.
Si, auparavant, la consommation de disques, de films ou de livres relevait d’une démarche plutôt consciente - bien qu'influencée par la publicité -, elle s’effectue désormais souvent de manière passive, à travers des recommandations de contenus personnalisés qui atterrissent directement sur nos smartphones. Or, selon une étude de juin 2020 menée par l’Observatoire de la langue française de l’OIF, sur 260 000 recommandations analysées sur la plateforme musicale Deezer, seulement 13% proposaient des albums et chansons francophones. Le même constat a été formulé par Mathieu Lacombe, ministre de la Culture et des Communications du Québec, lors de la 5e Conférence des ministres de la Culture de la Francophonie, lors de laquelle il a rappelé que seuls « 8% des contenus musicaux écoutés par les Québécois sur les plateformes numériques (étaient) francophones » – un chiffre qui descend à 5% pour les contenus provenant du Québec.
Ces statistiques traduisent deux tendances : d’une part, le nombre de contenus culturels francophones en ligne est encore faible et, d’autre part, ceux qui le sont, sont moins visibles et valorisés.
La ministres francophones de la Culture se penchent sur la question
Face à cette réalité, le gouvernement du Québec en collaboration avec l’OIF a organisé la 5e Conférence des ministres de la Culture de la Francophonie afin de pouvoir échanger sur les bonnes pratiques et, surtout, définir un plaidoyer commun pour défendre la diversité culturelle des pays, au travers de cette langue que nous avons en partage.
Car, si la création de contenus est du ressort des artistes et opérateurs culturels, il revient en effet aux Etats de mettre en place des politiques qui facilitent la production et favorisent l’accès aux marchés, notamment numériques.
Cette conférence a permis d’avoir un aperçu des progrès réalisés depuis plusieurs années, puisqu’une majorité des 36 pays présents ont mis les industries culturelles et créatives (ICC) au cœur de leur stratégie de développement. D’ailleurs, l’OIF, pour la première fois, les a intégrées dans sa dernière mission économique, qui s’est tenue au Bénin du 17 au 19 juin 2025. Preuve de l’intérêt croissant et du potentiel qu’elles représentent.
Mais si l’aspect création/production semble partout s’améliorer, encore faut-il, qu’à l’autre bout de la chaîne, les œuvres puissent être vues, valorisées et consommées, notamment dans l’environnement numérique.
La Déclaration de Québec
A l’issue de leur rencontre à Québec, les ministres de la Culture des pays francophones ont adopté une déclaration ambitieuse. Le document aborde tous les volets d’intervention et couvre la chaîne de valeurs des ICC, à savoir : la création, la production, la distribution et la diffusion. Les principaux axes sont résumés ci-dessous.
Axe 1 et 2 : Pour garantir des solutions pérennes, la mise en place de cadres législatifs et règlementaires tant au niveau national, régional qu’international est primordial. Il s’agit également de défendre, ensemble, la diversité des contenus culturels francophones dans l’’environnement numériques auprès des différentes instances internationales mais aussi avec les différentes parties prenantes.
Axe 3 et 4 : Les ICC sont au cœur de toutes les actions menées pour la découvrabilité. En effet, sans création pas de recommandations. Aussi, les Etats se sont accordés pour agir au niveau des acteurs locaux afin que les ICC soient compétitives et que les contenus culturels francophones puissent être plus présents dans l’environnement numérique, et qu’ils puissent bénéficier aux artistes et opérateurs culturels.
Axe 5 : Lorsque l’on parle de numérique, cela nécessite des aspects techniques. Aussi, cet axe vise à bâtir des référentiels et des données en français. En effet, l’IA étant essentiellement basée sur l’anglais, elle tend à invisibiliser les œuvres non-anglophones et par la même occasion met en danger la diversité culturelle.
Axe 6 : Ces diverses actions permettent, in fine, au consommateur de pouvoir avoir le choix. C’est pourquoi le dernier axe de cette déclaration s’adresse aux différents publics, afin qu’ils puissent mieux appréhender ces enjeux dans leurs modes de consommation.
On le voit bien, le chantier est d’importance. Cette déclaration est un point de départ, une feuille de route pour mieux orienter les actions à venir. Agir pour la découvrabilité c’est œuvrer pour exister dans l’environnement numérique, permettre de choisir et de découvrir une autre culture à travers sa musique, son cinéma, sa danse… des préoccupations depuis toujours au cœur du mandat de l’OIF.
En ligne avec ces objectifs, l’OIF met ainsi en œuvre depuis 2024 son projet « Industries culturelles et découvrabilité » et vient de lancer deux appels (jusqu'au 15 août) qui visent à faciliter la mobilité des artistes et leurs œuvres et à soutenir des initiatives innovantes de distribution et découvrabilité.