Entretien avec Michèle VIANES

Présidente de l'association Regards de Femmes

cMichèle Vianès, est Présidente de l’association Regards de Femmes, une ONG accréditée auprès du Conseil économique et social de l’ONU et également organisation internationale non gouvernementale (OING) auprès de la Francophonie. 

Quel est le but de l'association Regards de Femmes ?

Regards de femmes est une association créée en 1998 à Lyon. Elle a pour objectifs de déconstruire les stéréotypes qui enferment filles et garçons dans des comportements attendus, d’agir pour la parité politique et la parité professionnelle et enfin de lutter contre toutes les formes de violences envers les femmes, qu’ils s’agissent des violences économiques, psychologiques, physiques ou sexuelles et ceci dans un esprit de solidarité entre les femmes de France et du monde et en appliquant les principes républicains de laïcité et d’égalité femme-homme. 

Comment s’est faite la rencontre avec l'Organisation internationale de la Francophonie ?

Depuis 2013 Regards de Femmes s’est sensibilisée aux problématiques liées aux questions d’état-civil notamment parce que des centaines de millions de personnes dans le monde n’ont pas d’état-civil. C'est un enjeu majeur car sans cela il devient impossible d’atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Regards de Femmes a agit, d’une part, auprès d’ONU Femme afin d’inscrire cette question dans l’agenda du droit des femmes, car l'obstacle le plus important réside dans le fait que les femmes ne peuvent pas toujours déclarer la naissance de leurs enfants. D'autre part, nous avons travaillé avec l’OIF de manière très concrète dans différents pays. Nous avons organisé des conférences et colloques en France, mais également au sein de la Représentation extérieure de l'OIF auprès des Nations unies à New York. Nous avons également oeuvré à mettre en relation l'ensemble des partenaires travaillant sur cette thématique. Mais nous avons aussi eu d’autres actions avec l’Organisation internationale de la Francophonie. Il y a notamment celles où Regards de Femmes a sollicité l'OIF pour un soutien. Par exemple dans le domaine de la parité politique ou celui lié à la formation professionnelle des jeunes filles en Haïti ayant subit des grossesses précoces. Mais je dirai que notre lien le plus fort reste quand même celui établit grâce à la question de l’état-civil.  

Depuis combien de temps l'association Regards de Femmes est-elle membre de la COING ?

L’association Regards de Femmes a été contactée en 2019 dans le cadre d'un appel à accréditation au sein de la Conférence des Organisations internationales non gouvernementales de la Francophonie (COING). Elle a alors répondu à l’appel et a ainsi été retenue. Il ne faut pas oublier que Regards de Femmes antérieurement à cela est membre du Réseau francophone pour l’égalité Femme-Homme. J'en suis également membre et en charge de la coordination notamment pour l’Europe de l’ouest.

Que représente la Conférence des OING pour vous et quel est selon vous son rôle ?

La COING doit tout d’abord créer du lien et le faire vivre et ce à différents niveaux. J’ai beaucoup parlé des droits des femmes mais avec Regards de Femmes nous avons aussi des liens très forts avec La caravane des dix mots qui recouvre le domaine de la culture. Ces liens riches et divers sont pour moi importants. L’association Regards de Femmes embrasse tout le champ des droits des femmes car elles sont partout. L'association n'a donc pas de spécificités autres que tout ce qui concerne les femmes. Dernièrement nous intervenions sur un autre sujet qui était celui du droit de mourir dans la dignité. Pour moi la COING est un accélérateur car il met en relation de nombreuses OING et ONG motivées qui proviennent et oeuvrent dans différents secteurs. C’est par la COING par exemple que nous avons rencontré l’Observatoire Pharos  avec lequel nous travaillons actuellement sur le projet phare relatif à l’état-civil au Niger. C’est là que réside la force de la COING, c'est dans cette capacité à faire naître du lien et à tisser des actions communes.

Vous avez abordé le projet phare état-civil au Niger, comment s'est organisé le travail avec l’Observatoire Pharos et l’OIF ?

Lorsque l'OIF a souhaité faire ce projet phare Regards de Femmes a été contactée immédiatement. Cependant l'association ne fonctionne qu’avec des bénévoles il était nécessaire, notamment pour regrouper toutes les entités liées au projets, de s'appuyer sur une structure qui se compose de permanents. C’est comme cela que l’Observatoire Pharos s’est proposé de prendre le leadership. Nous étions quant à nous tout à fait d’accord pour apporter notre expertise et notre réseau sur le terrain. Regards de Femmes s’est concentrée sur les objectifs, ainsi que sur la formation des préposés aux écritures. Elle s'est également assurée que les femmes soient bien présentes dans l'ensemble du processus et dans toutes les actions menées. Nous avons ainsi fait appel au Niger à l’ONG CAO et Karkara. Nous avons également demandé que la FAD, une autre ONG spécialisée dans le droit des femmes, soit présente et ce afin de former les leaders locaux. En effet, il nous est apparu plus pertinent et bénéfique que les femmes rencontrent des femmes pour leur parler et les sensibilisent sur cette question. C’est d’ailleurs un vrai succès car depuis qu’elles sont en place il y a eu une véritable augmentation du nombre de filles et de femmes déclarées à l’état-civil.  

Depuis que vous êtes membre de la COING, avez-vous bénéficié de formations dispensées dans le cadre de la Francophonie ?

Nous sommes plutôt appelés dans l’autre sens et principalement pour aider à la formation des autres ONG. par ailleurs, lors de la Conférence précédente on m’a demandé d’intervenir en plénière à deux niveaux. Néanmoins nous sommes bien entendu totalement à l’écoute de tout ce qui pourrait nous permettre de nous enrichir intellectuellement et collectivement. C’est vraiment dans l’ADN de Regards de Femmes d’être ensemble, de participer, de partager les connaissances et les bonnes pratiques.

Quels messages portez-vous auprès de la société civile ?

Tout d’abord lorsque j’interviens, je dis toujours que nous sommes une OING accréditée auprès de l’OIF. Puis je m’attache à montrer à quel point ce « label » nous aide au quotidien dans nos actions d’association. Je parle également beaucoup de la stratégie de l’OIF pour l’égalité femme-homme car je trouve que c’est extrêmement important de la faire connaître au même niveau que d’autres instruments internationaux qui sont beaucoup plus reconnus. Je pense ici à la Convention contre les discriminations envers les femmes, celle également pour les enfants. Nous organisons d’ailleurs un colloque international le 16 octobre à Lyon et nous avons demandé à Madame Madeleine OKA BALIMA qui est la Cheffe de l’Unité égalité femme-homme de venir présenter cette stratégie. Je trouve que celle-ci est encore beaucoup trop ignorée et notamment dans les pays occidentaux. Enfin, je tiens à prouver par notre pratique quotidienne que la Francophonie gagne à être connue.

Peut-on parler d’un partenariat « gagnant-gagnant » lors que l’on envisage les relations entre la société civile, les Etats et gouvernements, mais également l’Organisation internationale de la Francophonie ?              

Ce qui est important et même primordial c’est que chaque entité reste et existe dans sa dimension. Je pense que nous, en tant qu’ONG, nous sommes là pour alerter les Etats et gouvernements et pour utiliser tous ces textes internationaux signés par ces mêmes Etats et gouvernements pour leur rappeler qu’ils en sont redevables. Je suis convaincu que si l’on s’adresse à eux sans agressivité mais simplement en leur expliquant les problèmes rencontrés et en leur rappelant le rôle qu'ils peuvent jouer dans leur résolution, alors nous rentrons dans un processus d’écoute mutuelle bénéfique à chacun. Une des raisons pour lesquelles Regards de Femmes travaille depuis près de 10 ans avec l’OIF, c’est que nous avons toujours trouvé à tous les niveaux une écoute ainsi que des propositions de solutions et des actions communes. Je crois que c’est dans ce rapport d’égal à égal et avec ce respect mutuel que l’on fait concrètement et durablement avancer les choses. Cette écoute réciproque me parait l’instrument le plus favorable à cette idée de « gagnant-gagnant ». Pour moi d’ailleurs c’est toujours un plaisir de travailler avec l’OIF et c’est toujours vers elle que je me tourne lorsqu'avec Regards de Femmes nous souhaitons monter un projet. 

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