A l’occasion du centenaire de la naissance de Boutros Boutros-Ghali, l’Observatoire Boutros-Ghali du maintien de la paix, en partenariat avec l’OIF et la France, a organisé, le 14 novembre au siège des Nations Unies, un séminaire sur l’avenir du maintien de la paix (« Entre chapitre VIII, Missions politiques spéciales et opérations de paix multidimensionnelles : Une nouvelle voie pour les opérations de paix onusiennes ? »).

A l’ouverture du séminaire, un hommage solennel a été rendu à Boutros Boutros-Ghali, ancien Secrétaire général de l’ONU et de la Francophonie, dont l’Agenda pour la paix de 1992 a posé les jalons du maintien de la paix onusien. Son parcours exceptionnel, sa contribution inestimable aux progrès du multilatéralisme et à l’approfondissement de la Francophonie politique ont été rappelés dans plusieurs interventions. La cérémonie a également été marquée par un message vidéo de Leia Boutros-Ghali.

Dans un contexte de complexification croissante des théâtres d’intervention du maintien de la paix, les discussions ont porté par la suite sur le thème général de la complémentarité entre les opérations de paix, les Missions politiques spéciales de l’ONU et les opérations de paix régionales.

L’événement a réuni une trentaine de participants constitués de représentants et d’experts de Missions permanentes francophones et d’organisations internationales, d’universitaires et de chercheurs. Il a également vu la participation de plusieurs intervenants de haut niveau, dont Jean-Pierre Lacroix, Secrétaire général adjoint aux opérations de paix de l’ONU, Huang Xia, Envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour la région des Grands Lacs, et le général Birame Diop, Conseiller militaire au Département des opérations de paix des Nations unies.

De manière spécifique, les perspectives croisées des intervenants ont permis de souligner les pesanteurs qui interfèrent dans la définition des mandats et la mise en œuvre des opérations de paix. Le leadership des Nations unies s’exerce dans des environnements de plus en plus volatiles, en proie à une multitude de menaces imbriquées. Dans le même temps, l’action de maintien de la paix est l’objet d’incompréhensions croissantes sur le terrain et la confiance indispensable entre les acteurs du maintien de la paix, les autorités des pays hôtes et les communautés locales est mise à mal. Les lignes de désaccord se renforcent aussi au sein des instances telles que le Conseil de sécurité et le Comité spécial des opérations de maintien de la paix (C-34), affaiblissant davantage le consensus nécessaire à la formulation de mandats clairs, réalistes et réalisables, assortis de ressources financières suffisantes.

Face à ces nombreux défis, les nouvelles conditions de succès des opérations de paix ont été ébauchées par les intervenants, en complément des critères traditionnels qui ont longtemps guidé l’action de maintien de la paix. L’alignement des intérêts des membres du Conseil de sécurité, la souplesse stratégique et l’agilité opérationnelle sur la base des enseignements du terrain, la combinaison de facteurs situationnels favorables, et la coopération triangulaire efficace des membres du Conseil de sécurité, des pays fournisseurs de troupes et des Missions de paix, sont indispensables à la réussite du maintien de la paix.

A l’ère du numérique et des risques engendrés par la désinformation, les réseaux sociaux représentent également un front nouveau sur lequel se déploie une réponse coordonnée des entités onusiennes, principalement articulée autour des activités de veille des plateformes digitales, d’analyse des récits et de diffusion de contre-messages destinés à enrayer le flux croissant d’informations malveillantes.

Pour les panélistes, le chapitre VIII de la Charte des Nations Unies prend une importance nouvelle au regard de la montée en puissance des forces régionales. L’avenir du maintien de la paix réside sans doute dans les modalités du partage des rôles entre les Missions, les agences de l’ONU et les organismes régionaux qui pourraient utilement se concentrer respectivement sur les efforts de médiations et de facilitation, l’assistance humanitaire et l’appui au développement, et l’imposition de la paix sous la houlette de forces régionales. Bien qu’on observe une tendance à la diversification des formes de présence multilatérales sur les théâtres, les Nations unies doivent conserver leur responsabilité première en matière de préservation de la paix et de la sécurité internationales, ont insisté la plupart des intervenants.

 

Pour voir ou revoir le séminaire :

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