Dépêchée aux Seychelles à l’occasion du premier tour de l’élection présidentielle et des élections générales des 25, 26 et 27 septembre 2025, la Mission électorale de la Francophonie a partagé lors d’une conférence de presse, le 29 septembre, à Victoria, un premier bilan de ses observations et analyses. A retrouver dans la déclaration ci-dessous.
A l’invitation des autorités seychelloises, la Secrétaire générale de la Francophonie a dépêché une Mission électorale de la Francophonie (MEF) à l’occasion des élections générales des 25, 26 et 27 septembre 2025 aux Seychelles.
Conduite par Monsieur André Parant, ancien Ambassadeur de France, cette mission a bénéficié de la participation d’experts provenant de divers pays francophones (Maurice, Sénégal, Tunisie, Burundi) d’une parlementaire de Djibouti, membre de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF).
Présente à Victoria (Ile de Mahé) depuis le 22 septembre 2025, la MEF s’est entretenue avec les parties prenantes du processus électoral, notamment la Commission électorale (CE), la Cour suprême (CS), la Commission des médias, la Commission des droits de l’Homme (CDH) et l’Ombudsman, des représentants des partis politiques et des candidats indépendants, des organisations de la société civile ainsi qu’avec le ministre des Affaires étrangères et des partenaires internationaux, présents aux Seychelles. La mission s’est également entretenue avec les Chefs de la mission électorale conjointe de l’Union africaine et du Marché commun de l'Afrique orientale et australe (UA-COMESA), de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), du Forum des commissions électorales des pays membres de la SADC (ECF-SADC) et de l’Union européenne (UE).

La Mission électorale de la Francophonie s’est attachée à évaluer, en application de son mandat et des dispositions de la Déclaration de Bamako du 3 novembre 2000, les conditions de préparation et de déroulement des élections.
Les jours des scrutins, les membres de la MEF ont suivi le déroulement du vote dans les îles Fregate (25 septembre), Desroches et Alphonse (26 septembre) et Mahé (27 septembre) dans 24 centres de vote repartis sur 26 circonscriptions électorales du pays.
Sur la base des entretiens avec les organes et acteurs du processus électoral, y compris la société civile, et de ses observations, la MEF établit les constats préliminaires suivants :
- Les élections présidentielle et législatives sont régies par un cadre juridique exhaustif garantissant des élections démocratiques.
- Le processus électoral s’est déroulé dans un climat calme et paisible, créant des conditions favorables à l’acceptation des résultats. Ce climat traduit l’engagement des citoyens seychellois en faveur de la stabilité institutionnelle et de la consolidation de la démocratie.
- De manière générale, les interlocuteurs rencontrés ont apprécié l’augmentation, pour les deux scrutins, du nombre de candidats en lice, considéré comme un signe de pluralisme politique.
- La Commission électorale est expérimentée et s’est acquittée de sa mission avec sérieux et impartialité, renforçant la confiance des parties prenantes. Les membres des centres de vote étaient en nombre suffisant et ont fait preuve de professionnalisme.
- L’enregistrement des électeurs s’est déroulé de manière satisfaisante et exhaustive.
- Un effort notable a été consenti en matière d’inclusion avec, pour la première fois, l’introduction de dispositions spécifiques en faveur des personnes malvoyantes. Cette démarche de la part de la CE constitue une avancée importante visant à faciliter l’exercice du droit de vote et à garantir une meilleure accessibilité et inclusivité du processus électoral.
- La société civile a observé l’ensemble du processus électoral, sans entraves. Elle a également été associée à l’ensemble des consultations et actions d’information conduites par la CE.
- Le cadre juridique et constitutionnel prévoit des voies de recours devant la formation constitutionnelle de la Cour suprême, avec une possibilité d’appel auprès de la Cour d’appel. L’existence de ces mécanismes constitue une garantie essentielle pour le règlement pacifique des différends électoraux.
- Le scrutin s’est déroulé dans le calme, en dépit de quelques retards mineurs à l’ouverture des bureaux de vote, sans impact sur l’intégrité du processus électoral.
- Les forces de l’ordre étaient présentes, mais discrètes.
- Les matériels et documents électoraux étaient disponibles, en quantité suffisante, dans tous les centres de vote visités. Néanmoins, la configuration et la disposition des isoloirs dans certains bureaux de vote pourrait être revue pour mieux assurer le secret du vote. Tous les centres de vote visités par la MEF étaient équipés de rampes d’accès pour les personnes à mobilité réduite et des bulletins de vote en braille étaient disponibles.
- Les femmes étaient fortement mobilisées comme électrices et membres des centres de vote.
- Les bureaux de vote ont ouvert et fermé aux heures légales.
- Les délégués des candidats et des observateurs nationaux et internationaux étaient présents dans la plupart les bureaux de vote visités.
- Les opérations de dépouillement se sont déroulées en présence des représentants des partis politiques, candidats et observateurs.

La MEF relève néanmoins des points d’amélioration en vue des prochaines échéances électorales :
- Ne pas réviser le cadre juridique à l’approche des élections. Les amendements du cadre juridique, notamment la loi électorale et la loi sur les partis politiques, à quelques mois seulement du début du processus électoral et en l’absence d’un processus consultatif inclusif et structuré, ont suscité des inquiétudes de la part des candidats et partis politiques et posé des défis organisationnels pour la CE.
- Prévoir un délai suffisamment raisonnable pour le dépôt des candidatures. La demi-journée prévue pour chaque scrutin, s’est révélé particulièrement courte, compte tenu du nombre élevé de candidats. Cette contrainte a engendré des difficultés pratiques, notamment pour ceux appelés à déposer en fin de session et ont parfois rencontré des obstacles pour le compléter dans le temps imparti. Une telle limitation temporelle peut constituer un obstacle à l’égalité de traitement entre candidats et restreindre la fluidité du processus de candidature.
- Le financement de la vie politique, et en particulier l’amendement à la loi sur les partis politiques autorisant le financement étranger, suscite des préoccupations majeures exprimées par plusieurs parties prenantes rencontrées. Bien que ces amendements limitent les dons aux activités de formation ou de renforcement des capacités des partis politiques qui en bénéficient, l’absence de plafonds, le manque d’exigences relatives à la traçabilité de l’origine des fonds ainsi que l’insuffisance de mécanismes de contrôle garantissant la mise en œuvre effective de ces dispositions soulèvent des inquiétudes.
- La couverture médiatique des activités gouvernementales en période de campagne électorale mériterait d’être davantage régulée, afin d’assurer des conditions égales à tous les candidats.
- La MEF relève une sous-représentation marquée des femmes parmi les candidats : aucune candidature féminine à la présidence de la République et 51 candidatures féminines sur 125 à l’Assemblée nationale. Cette faible présence féminine met en lumière la nécessité de mesures législatives et initiatives favorisant une meilleure participation des femmes aux élections en tant que candidates.
Aucun candidat n’ayant obtenu la majorité absolue dès le premier tour, la MEF prend note de la tenue du deuxième tour de l’élection présidentielle les 9 – 11 octobre prochain. Par ailleurs, elle encourage toutes les parties prenantes à utiliser les voies légales en cas de contestation des résultats électoraux ou des opérations de vote, afin de garantir le respect des procédures et la stabilité du processus démocratique.
Un rapport final sera élaboré à l’issue des élections générales. Il formulera des recommandations plus détaillées qui viseront à orienter les acteurs concernés en faveur d’un renforcement du cadre juridique et du dispositif organisationnel des élections aux Seychelles et à contribuer à la consolidation de la démocratie et de l’Etat de droit.
La MEF rappelle la disponibilité de l’Organisation internationale de la Francophonie à accompagner les institutions et les acteurs politiques seychellois dans la mise en œuvre des recommandations qui seront formulées.
La Mission électorale de la Francophonie saisit cette occasion pour remercier les autorités des Seychelles, les différents acteurs du processus électoral et, d’une manière générale, la population seychelloise pour l’accueil chaleureux qui lui a été réservé, ainsi que les facilités accordées à ses membres durant leur séjour à travers le pays ?